Inktober Jour16: ROCKET (Fusée)

par | 16 Oct 2020 | Inktober 2020

16 octobre: ROCKET (Fusée)

 

La semaine n’avait pas été joyeuse. Elle avait commencé par le décès du doyen, le grand-père de Mia, le père de sa mère. Un peu jeune pour saisir complètement cet évènement, elle avait pourtant suivi toute la famille à l’enterrement. Il était mort de vieillesse dans son lit. Mia se demandait ce que c’était vraiment. Sa maman lui avait expliqué, les yeux forts rouges, qu’on ne le reverrait plus. Elle essayait de penser à ce qui se passerait si un jour elle ne voyait plus son papa à elle. Est-ce qu’elle pleurerait ? C’était certain. Alors elle commençait un peu à comprendre pourquoi sa maman était dans cet état-là, même si cette dernière tentait de le dissimuler. Heureusement, se disait-elle, son papa à elle, il ne pouvait pas disparaître. Ce n’était pas possible. Il allait toujours être là.

De retour à la maison, après l’enterrement, Mia s’était précipitée pour jouer dans sa chambre. Mais comme par instinct, certains enfants sentent cela, elle en sortit pourtant peu de temps après. Un besoin de voir sa maman, de lui montrer qu’elle, elle était toujours là. De la rassurer peut-être. Elle se dirigea alors vers la chambre de sa mère, qu’elle trouva assise sur son lit. Elle tenait une réplique de fusée qu’elle faisait tourner dans ses mains. Des larmes lui coulaient sur le visage.

La petite fille s’approcha, c’était la première fois qu’elle voyait cette fusée. Et la première fois que sa mère ne cachait pas ses larmes. Entre tous les préparatifs de l’enterrement, prévenir la famille et le reste des connaissances de son père, elle n’avait pas encore eu le temps de se poser et de vivre pleinement son chagrin. C’était donc la première fois que la petite fille observait des larmes sur le visage de sa mère.


Elle était perturbée, et triste de la voir dans cet état. Normalement c’était la maman qui guérissait ses chagrins de petite fille. Comment elle, du haut de ses 4 ans, allait bien pouvoir la soigner en retour ?

Un peu perdue, elle réfléchit à comment sa maman faisait pour elle. La prendre dans ses bras, lui dire qu’elle était là. Ça, ça marchait à tous les coups. La petite s’exécuta, et tenta d’imiter les gestes qui la sauvaient d’ordinaire de sa détresse d’enfant.

La mère comprenait que sa fille soit perdue de la voir dans cet état. Elle n’en accepta pas moins les petits bras réconfortants.
Puis elle lui raconta l’histoire de cette fusée. Son père – le grand-père – la conservait précieusement. Il la tenait lui-même de son père, qui la lui avait offerte à la sortie de l’album de Tintin dont il raffolait : « Objectif Lune ». Depuis, il l’avait utilisée pour raconter ses premières histoires à sa fille – la maman –, puis à sa petite-fille, Mia, quand elle n’était encore qu’un bébé. Mia ne s’en souvenait pas, mais acquiesça tout de même.


Elle conclut finalement avec cette phrase :


– « Et maintenant qu’il a fait son dernier voyage, c’est un peu comme s’il était parti avec la vraie fusée, en nous laissant la maquette… ».


Elle fondit à nouveau en larmes, Mia lovée dans ses bras.

Peu à peu, la vie reprit son court. La mère retourna au travail, la fille à ses vacances. La petite semblait en revanche très concentrée. Là où en temps normal elle préférait aller dehors, elle passait ses journées à jouer seule dans sa chambre. Le papa s’inquiéta un temps, puis se rendit compte du plaisir de la fillette à s’occuper ainsi, et se rassura.

Quand vint un jour où elle réclama à grands cris la présence de sa maman. À l’arrivée de cette dernière, une sorte d’exposition se présenta à ses yeux. Une pyramide de carton trônait au milieu de la pièce, coloriée au feutre en damiers rouges et blancs. Au sommet de la pyramide, la petite réplique de fusée de Tintin.

– « Je t’ai construit une fusée, comme ça tu vas pouvoir retrouver grand-père dans son dernier voyage, et lui rendre la sienne, toute petite, qu’il a oubliée ici. Et puis tu reviendras me voir pour que tu me répètes, à moi, les histoires qu’il t’aura racontées, là-haut ! »



Avec un immense sourire, miroir de celui de sa fille, la maman la prit dans ses bras, l’embrassa tendrement, les joues couvertes de larmes de joie, et lui promit de lui raconter tout ça.



Depuis ce temps, et jusqu’à ce que Mia ait grandi, de nombreuses histoires furent inventées. Beaucoup impliquaient cette réplique de fusée, en hommage au grand-père, et à la tendresse de sa petite-fille. Et tous les soirs, mère et fille partaient pour les étoiles.

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