Inktober Jour12: SLIPPERY (Glissant)

par | 12 Oct 2020 | Inktober 2020

12 octobre: SLIPPERY (Glissant)

 

Je fais partie d’un club d’escalade. Ça consiste la plupart du temps à grimper en salle, avec des prises fixées aux murs. Mais parfois aussi à aller en montagne ou sur des falaises, et d’en réaliser l’ascension. Quand c’est en pleine nature, on se retrouve sur des murs déjà préparés, avec une piste plus ou moins tracée contenant les emplacements pour poser nos dégaines. Vous avez peut-être fait de l’escalade à l’école, auquel cas vous avez entendu parler de ce qu’on appelle grimper « en tête ». Par opposition à l’escalade « en moulinette » où la corde est déjà accrochée au sommet, grimper en tête signifie qu’on va poser sa propre corde d’assurage lors de l’ascension. Pas de corde en haut. On va donc accrocher ce qu’on appelle des « dégaines », permettant de fixer la corde qui va nous assurer à la paroi directement, au fur et à mesure de la montée. On crée notre propre assurage en résumé.

Cette fois-ci, nous avions décidé de monter un peu le niveau, et de tenter de grimper « en corde tendue ». Pour faire court, nous allions monter à deux avec la même corde. Pas d’assureur restant en bas de la falaise. Le premier commence l’ascension, comme une grimpe en tête, pose les dégaines, jusqu’à ce que la corde qui le relit au second soit tendu. C’est à ce moment que le second se met à faire l’ascension à sa suite. Nous avions déjà réalisé ce genre de chose sur des murs préparés, avec les emplacements pour poser les dégaines, déjà placés sur le mur au préalable. L’envie de se surpasser était là cette après-midi, et pour corser le tout, la piste que nous avions choisi n’était pas préparée. Il allait falloir venir poser des « coinceurs », qui, comme le nom l’indique, allaient se coincer dans une fissure, par exemple, pour assurer le point d’ancrage. En clair, préparer la piste nous-même, tout en montant. Ça allait occasionner des efforts supplémentaires lors de la pose, mais aussi du matériel en plus à porter.

Un peu moins expérimenté que mon partenaire de cordée, j’allais être second, ce qui lui laissait la responsabilité de mettre les coinceurs et les dégaines.

Lentement mais sûrement, nous commencions l’ascension. Tout se passait bien, je suivais le rythme, tout en récupérant les dégaines posées par mon collègue pour pouvoir continuer l’ascension.

À environ 30 m de haut mon binôme commençait à fatiguer. La fin de la piste était proche, mais il fallait encore un petit effort sur un passage difficile. C’est là que le sort lui joua un tour. Il n’avait pas vu que de l’eau avait stagné sur la prise qu’il avait attrapé de sa main gauche. Au moment de se hisser, il glissa. In extremis sa main droite réussit à raccrocher la prise qu’il venait de lâcher, mais ça n’eut que l’effet de le faire glisser davantage et de perdre l’équilibre. Il tomba. La dernière dégaine, sous le poids, arracha le coinceur. Avec la fatigue, il n’avait pas dû être bien placé, ou alors la roche s’était brisée. C’était au tour du coinceur suivant de s’arracher, ne résistant pas à la pression du poids et de l’élan déjà donné au corps du grimpeur.

Par bonheur, la dégaine suivante que je n’avais pas encore atteinte avait tenu. Je reçus le corps de mon camarade en pleine face. Tous les deux bien sonnés, il nous fallut un certain temps pour se raccrocher au mur et amorcer la descente. Il n’était plus question de terminer cette ascension. Les autres membres du club restés en bas, témoins de la scène et affolés, nous récupérèrent en douceur. Je m’en sortais avec les mains ensanglantées, et un mal de crâne conséquent. Mon partenaire avait lui été un peu plus choqué. En plus des écorchures un peu partout, son épaule était douloureuse. Il s’avéra qu’elle n’était pas déboîtée. Il n’empêche que la frousse de tous les diables que nous avions eue, équivalait presque à une fracture.

Nous avions eu les yeux un peu plus gros que le ventre pour cette grimpe, même si ça s’était traduit par plus de peur que de mal. Nous en avions retiré une leçon : nous n’étions peut-être pas assez préparés, et avions frôlé la catastrophe.

Aujourd’hui, cet épisode n’a enlevé le goût de l’escalade à aucun d’entre nous, nous retournerons plus tard sur ce pic, c’est certain. En attendant, on s’entraîne sur plus petit, et mon collègue a gagné son surnom de « peau de banane » !

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